mardi 23 novembre 2010

Une semaine à Gatton : salades, échalottes, oignons...


Une nouvelle aventure commence ici a Gatton depuis vendredi 12 novembre. Ici c'est un peu perdu, il n'y a pas de touristes, pas beaucoup de choses à faire. Il y a un caravan park aux allures de Sangatte d'où emerge une odeur d'oignons, il y a du travail dur, des ampoules aux mains, des douleurs de muscles jusque là endormis. Il y a une caravane dans laquelle on vit, avec des rideaux defraichis, des murs sales, une horloge qui s'est arrêtée, des tiroirs qui s'ouvrent mais ne peuvent se fermer...

Ici ça ne ressemble pas aux paradis qu'on a pus visiter, mais pourtant un autre trésor s'y cache. Ici il y a de belles leçons de vie et de très belles rencontres.

Première leçon : travailler dans les champs.
Lever tous les jours à 3h30, coucher à 20h00.
Premier jour : des oignons, des ampoules, des muscles qui font mal, des écorchures, 8 heures de travail, et pas beaucoup d'argent à la clé.
Deuxième jour échalottes, 4 heures de travail, on ne peut pas faire plus, il n'y a plus de boites pour mettre les échalottes. Paie misérable.
Troisième jour : Laitues. on trouve un employeur fixe, qui nous teste sur l'assemblage et le stockage des boites pour les laitues. On est dehors, sur le tracteur, dans les champs, Avec quatre autres gars qui coupent les laitues.
4 eme jour, on fait la meme chose que le jour précédent, sauf que le fermier ne veut pas autant de palettes, et qu'il y a un gars de plus. On travaille plus que la veille mais on gagne moins. Néanmoins on rentre tôt au caravan park.
5 eme jour : à 3h30 le caravan park semble désert, les autres dorment, car la plupart ne travaillent pas aujourd'hui. Il pleut et le travail dans les champs est devenu impossible pour certaines récoltes. Ca n'est pas le cas pour les laitues. Sur le terrain, les conditions sont très difficiles. La boue ralentit les coupeurs de laitues, et seul le gros tracteur peut se frayer un chemin dans les allers du champs. Les boites en carton pour 12 laitues sont remplacés par des boites en plastiques pour 6 laitues. Il faut aller deux fois plus vite pour les faire. On est trempé, congelé. AU bout de 6 heures le travail est fini, mais on doit attendre plus d'une heure que notre van vienne nous chercher.
6 eme jour : le caravan park est toujours désert, la pluie est encore prévue au programme. En fait il ne pleuvra pas, mais les boites sont encore plus lourdes. Ce sont des boites en plastique pour 12 laitues cette fois. Nos muscles travaillent en régime forcé. C'est lourd, mais on commence à s'habituer. Le tracteur lui manque de se renverser avec tous le chargement soit 2 palettes contenant 104 boites de 12 laitues chacune. Antoine les sauve in extremis.
7eme jour : Aujourd'hui pas de travail, une tempête est prévue, en fait il y a beaucoup de vent, mais pas de pluie.
8 eme jour : c'est notre jour de repos hebdomadaire aujourd'hui mais on est quand même allé voir s'il y avait du boulot à 4 heures du mat. Personne, du coup on s'est regardé un petit film et on s'est recouché.
Ce qu'on a appris : le travail dur, le labeur, le travail de la terre. Mais une grande satisfaction aussi de faire travailler son corps, d'avoir le mental pour aller jusqu'au bout, pour avoir le courage de continuer malgré les conditions difficiles, et de pouvoir se débrouiller pour gagner de l'argent dans un autre pays.


Deuxième leçon : avoir un petit chez soi.
Ici on vit dans une caravane, qui reste sur place, installé à tout jamais dans ce qui semble être un cimetière de caravanes. Celles-ci sont dans un piteux état. Et pourtant au bout de quelques jours on s'y sent quand même comme chez soi.
On a un lit pour nous, de quoi faire un peu la cuisine. Une petite avancée abritée pour se poser, pour lire, jouer de la guitare et accrochée notre linge. DE l'electricité, de l'eau. Il y a des histoires dans cette caravane de ses anciens locataires. Un petit message à côté du miroir "Don't worry you are beautiful" (Ne t'inquiète pas tu es magnifique), il y a une double page d'un journal japonais, coréen ou chinois. Il y a des conseils numérologiques pour une star née en 1986... Et maintenant il y a nos affaires qui font de cet endroit un petit chez soi.

Troisième leçon : rencontrer des gens.
Le premier jour où on est arrivé ici, j'avoue que ça faisait un peu glauque. Des gens attendaient derrière un hangar leur paie en cash. Et une odeur persistante dans le caravan park des oignons rammassés dans la journée.
En fait au fur et à mesure on a rencontré les gens du caravan park. Ici tout le monde est là pour travailler, mais c'est aussi un petit village, où on se dit bonjour. Parfois on pousse le bonjour un peu plus loin.
On a fait la connaissance de deux canadiens, un peu perchés, et drôle avec leur accent québecois, mais très sympathique.
Il y a également pas mal de français. Une d'entre elle est une légende. Ca fait déjà plus d'un an qu'elle est ici, mais elle part dans deux semaines poursuivre son aventure australienne. Elle nous a donné pleins de conseils pour trouver du boulot, elle est adorable.
On a égalment rencontré un type de Hong kong, du Japon, et de Corée lors du barbecue gratuit du dimanche après-midi. Timide aux premiers abords, eux aussi nous ont donné des informations pour trouver du boulot.
Il y a aussi eu des australiens travaillant ici, racontant leurs petite histoires et leurs rêves.
Un allemand rencontré au bord de la piscine, et qui voyage depuis quelques années dans le monde entier. Il était négociant de vin pendant 2 ans en Thailande, puis il est allé en Nouvelle Zélande et il continue son voyage au gré de ses envies.
Des gens de Côte d'Ivoire, du Rwanda, du Congo, à quelques pas de notre caravan à qui on dit bonjour 10 fois par jour, et avec qui on reste discuter de temps en temps.
Un professeur du Zimbabwe au nom d'Innoncent,et au tempérament de feu, nous expliquant son coup de coeur pour une française du caravan park et prêt à donner sa BMW pour les doux yeux de sa belle pas encore conquise.
Des femmes de Papouasie- Nouvelle Guinée, qui nous on prêté leurs ciseaux le premier jour de travail dans les oignons. Elles allaient deux fois plus vite que nous, et continuaient à travailler quand nous avions arrêté au bout de 8 heures de travail. On les a recroisé par la suite, l'une d'entre elle m'a pris dans les bras, m'a donné une poire, elles m'ont fait passé devant pour avoir ma paie des oignons, et elles me sourient à chaque rencontre.
Un jeune de 19 ans du Vanuatu, Antonio, nous expliquant que chez lui il a 6 ha de terrain, et qu'il va être le premier de son pays à rentrer dans la air force. Pour l'instant il gagne un peu d'argent avant de toucher son rêve, et il en donne aux autres. Pour un allemand devant se rendre à un concert d'orgue de grande importance, n'ayant plus d'argent et ne pouvant pas se permettre d'abimer ses doigts avant le concert, Antonio a donné une partie de son salaire tous les jours (un contenant d'oignons par jour d'une demi tonne, qu'Antoine et moi avions mis 2 heures à remplir à deux). A la fin de la semaine il lui a donné 200 dollars, lui permettant de retourner à Brisbane pour son concert. Il nous explique qu'il n'a pas besoin d'argent, qu'il a la chance de ne pas en manquer, et que ça lui fend le coeur de voir des gens qui en manquent. Pour lui ce petit don de travail et d'argent lui est rendu au centuple, car il se sent béni. C'était une très belle leçon de vie.
Donner ce qu'on a à son prochain qui en a plus besoin...
Toutes ces rencontres nous enrichissent, et finalement cet endroit un peu perdu, où il n'y a pas grand chose à faire à part traviller, ressemble à un petit village qui représente un petit monde à lui tout seul. Et c'est dans cet endroit aux allures de Sangatte que l'on a fait les rencontres les plus marquantes, et ça n'est pas fini...

1 commentaire:

  1. Yep ! Super votre blog ! Elle est incroyable votre vie là bas, ça à l'air très dure mais très enrichissant aussi. En tout cas, on pense très fort à vous !

    Jéjé et Ludy

    RépondreSupprimer